Catégorie : Réflexion

Magicien, illusionniste, prestidigitateur… Qui est quoi ?

Un magicien est, au sens large, toute personne qui pratique l’art magique, qu’il s’agisse de manipulations, d’effets spectaculaires ou de mentalisme. Dans l’Antiquité et jusqu’au Moyen Âge, le mot désignait plutôt des prêtres, chamans ou sorciers supposés posséder de véritables pouvoirs surnaturels. Ce n’est qu’à partir du XVIIIᵉ et surtout du XIXᵉ siècle que l’on commence à employer le terme pour désigner des artistes qui simulent la magie afin de divertir, tout en conservant parfois une aura mystérieuse. Aujourd’hui, « magicien » reste le mot le plus courant pour désigner tout artiste de magie, quel que soit son style.

L’illusionniste est un magicien spécialisé dans les effets visuels spectaculaires. Sur scène, il crée des apparitions, disparitions, lévitations, transformations ou découpages spectaculaires. Ce terme prend son essor au XIXᵉ siècle, notamment grâce à Jean-Eugène Robert-Houdin, considéré comme le père de la magie moderne, qui parlait déjà de « l’art de l’illusion » pour décrire ses spectacles. Au XXᵉ siècle, des artistes comme Harry Blackstone, David Copperfield ou Siegfried & Roy ont popularisé cette image d’un artiste mêlant machinerie, mise en scène et effets grandioses. Aujourd’hui encore, le mot « illusionniste » évoque des shows à grande échelle, souvent accompagnés de lumières et d’une forte dimension théâtrale.

Le prestidigitateur, quant à lui, est un magicien qui met l’accent sur l’adresse manuelle et la rapidité des doigts. Le mot apparaît au XVIIIᵉ siècle, formé à partir du latin praestigiae (« tours, tromperies ») et digitus (« doigt »). À cette époque, les prestidigitateurs se produisent dans les foires, cabarets ou salons bourgeois, captivant leur public avec des manipulations de cartes, pièces ou autres petits objets, sans recours à de grands décors. Robert-Houdin utilisait volontiers ce terme pour se démarquer des « faiseurs de miracles » prétendant posséder de réels pouvoirs. Aujourd’hui, bien que ce mot soit moins employé par le grand public, il reste apprécié dans le milieu magique pour désigner un travail technique précis et raffiné, souvent pratiqué en close-up.

Historiquement, avant le XIXᵉ siècle, un magicien était perçu comme un être aux pouvoirs surnaturels. Le XIXᵉ siècle marque un tournant, transformant la magie en art de spectacle, et donnant naissance à une distinction entre l’illusionniste, créateur d’effets grandioses, et le prestidigitateur, virtuose de la manipulation. Au XXᵉ siècle et jusqu’à aujourd’hui, le mot « magicien » s’impose comme terme générique, tandis que « illusionniste » et « prestidigitateur » précisent le style et la spécialité de l’artiste.

A propos des dés à jouer… par Raymond Heine

Une sortie scolaire a permis la fortuite révélation d’un objet rare, le premier dé au mercure découvert, qui prouve que les jeux ont été accompagnés de méthodes de triche ingénieuses… depuis la nuit des temps.

Alors qu’en 2000, il s’initie ludiquement aux fouilles archéologiques sur le site de la villa gallo-romaine de Mageroy (Ie – IVe siècle après J.-C.), en Belgique, un jeune enfant fait une découverte inédite : un petit cube d’os, qu’il a involontairement cassé en trois morceaux et dont s’écoule un liquide gris. Il a ainsi mis au jour accidentellement, nous révèlent désormais des chercheurs dans la revue Pallas d’octobre 2022, le premier (et seul) dé truqué au mercure de l’Histoire, daté de la moitié du IIe siècle apr. J.-C. Les recherches ont été menées dans le cadre des travaux réalisés par le projet européen ERC Locus Ludi que dirige la professeure Véronique Dasen (Université de Fribourg, Suisse).

Thomas Daniaux, chercheur du département d’archéologie de l’université suisse qui a participé à son étude, explique ainsi, cité par Sciences et Avenir :

Sans cet accident, nous n’aurions jamais remarqué que le dé était truqué, tout simplement parce que le mercure n’a pas vraiment d’incidence sur le poids de l’objet.

Une triche qui existe depuis aussi longtemps que les jeux

Les preuves archéologiques indiquent que les jeux de dés seraient nés à l’époque romaine impériale (27 av. J.-C. – 476 apr. J.-C.)… et la triche en même temps ! Les jeux de hasard étaient alors très populaires dans toutes les couches de la société et pouvaient faire tirer le gros lot à leurs gagnants. Dès lors, au milieu de dés classiques apparaissent des dés aux faces dédoublées, permettant d’augmenter les chances de tomber sur un certain chiffre — si bien que selon les écrits d’Apollinaire, le roi des Wisigoths Théodoric Ier (393 – 451 apr. J.-C.) les examinait avec soin avant de jouer. Mais le dé ici retrouvé fait appel à une autre méthode de triche, plus pernicieuse.

Il a été minutieusement creusé. L’une de ses faces pouvait ainsi être remplie d’une faible quantité de mercure pour alourdir le dé dans le bon sens. Une technique qui n’avait pas d’incidence sur le poids total de l’objet, car seule une partie était remplie (un tiers environ), permettant au liquide assez dense d’y circuler. Une méthode similaire existait d’ailleurs dès le Ier siècle de notre ère, avec une partie lestée en limaille (poudre) de plomb et l’autre laissée vide, ce qui leur conférait une masse similaire à leurs semblables non truqués. Par ailleurs, à cette époque, les valeurs n’étaient pas affichées sous forme de points mais d’ocelles incisés noirs, dont la somme des faces opposées était toujours égale à 7.

Dé asymétrique avec des faces opposées totalisant le chiffre 7. Wikimedia Commons / The Portable Antiquities Scheme, Edwin Wood, 2015-10-06

De cette façon, le 1 s’opposait au 6, le 2 au 5 et le 3 au 4. Un joueur voulant forcer la face 6 devait ainsi faire couler le mercure (ou le plomb) à l’intérieur de la face 1. Pour cela, il pouvait — le plus discrètement du monde — tapoter le dé sur sa cuisse ou sur la table, ou encore laisser la face 1 vers le bas durant quelques secondes le temps que le liquide se déplace. L’objet découvert en Belgique, en plus d’être un « véritable bijou d’illusionnisme », était sûrement de grande valeur, importé d’un atelier de la ville de Rome où circulaient les matières plus rares comme le mercure. Par ailleurs, la « virtuosité » de la technique utilisée pouvait aussi expliquer un tel prix, nous révèle Thomas Daniaux dans un mail :

Le dé était creusé uniquement à partir des ocelles qui mesuraient parfois moins de 2 millimètres de diamètre. Cela est extraordinaire, car il fallait des instruments plus fins que ce diamètre et un savoir-faire digne d’un orfèvre pour les fabriquer. Cela nous permet d’évaluer le prix (certainement assez élevé) du dé terminé et donc des sommes colossales qui étaient pariées dans les jeux d’argent.

Le premier dé de ce genre décelé

Mais ces ruses étant déjà connues, comment affirmer qu’il s’agit du « premier dé truqué au mercure de l’Histoire » ? À ce jour, c’est en tout cas la première attestation archéologique de ce type d’objet avec ce métal. Sa découverte laisse toutefois penser que « nous sommes passés à côté, par le passé, d’autres dés au mercure », indique Thomas Daniaux. Pour le moment, aucune source écrite ne fait malheureusement mention des règles détaillées des jeux qui étaient pratiqués avec ces dés. Les méthodes de triche utilisées à travers ce dé au mercure sont pourtant toujours utilisées aujourd’hui, sous le nom de Tappers ou Shifting, indiquent les auteurs de l’étude dans leurs recherches.

Texte vu sur le Net « Geo » -Mathilde Ragot 20/10/2022